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"Chaque geste veut toujours dire la même chose".

 

 Toute critique de l'approche synergologique débute ou reprend à un moment ou à un autre cette affirmation tirée des livres de synergologie dans l'objectif de montrer la légèreté de la démarche.

Or la phrase "Chaque geste veut toujours dire la même chose" sortie de son contexte ne veut effectivement absolument rien dire. Par contre, une fois éclairée, elle est l'expression juste du message synergologique. 

Attardons-nous ici à remettre un peu de contexte.

Dans la phrase "Chaque geste veut toujours dire la même chose", il faut comprendre que le geste envisagé dans cette acception est une catégorie large, en fait un mouvement corporel effectué de manière non intentionnelle. La personne parle en s'accompagnant de gestes auxquels elle n'a pas réfléchi. 
Le geste ou attitude mi-consciente peut être un geste d'autocontact (geste fait sur le visage ou sur le corps),  un geste de préhension (geste réalisé sur un objet) une boucle de rétroaction (geste d'une main dans l'autre), une mimique (micoréaction), ou encore un geste dans l'espace (geste).
Admettons que nous parlions d'un geste dans l'espace. Sa signification est d'abord tributaire de la main utilisée, avec trois possibilités : main droite, gauche, ou les deux mains. Il convient ensuite d'observer la configuration de cette main puis la destination dans l'espace du geste.
La configuration  de la main est dépendante de la rotation du poignet, (cinq possibilités), de la position verticale du poignet (trois  possibilités), de la position des doigts (sept possibilités : fermés, ouverts , mi ouverts, bourse, pince, tendus, éventail)

Ensuite pour chacune de ces configurations des doigts, il y a encore plusieurs possibilités, propre à chaque configuration. Plus de 800 positions différentes s'offrent en fait au regard de l'observateur. Et il n'a été évoqué ici que la configuration de la main. 
Lorsque la personne  formée à identifier un geste se sera demandé dans quelle partie de l'espace le geste est effectué, c'est-à-dire devant elle, derrière elle, à gauche ou à droite d'elle-même, autour ou à l'extérieur. Il sera  temps alors de se demander si l'axe de la tête retrouve la main ou s'en dissocie, et si le geste est effectué le bras replié ou tendu, car il est possible que ce ne soient pas les mêmes zones cérébrales qui soient activées, pas les mêmes intentions donc.
Mais la personne formée à observer, ne pourra pas non plus occulter les mimiques (micoréactions) associées à la production du geste. Elle se posera encore quelques questions subsidiaires, comme celles de se demander si la personne cligne ou non des paupières en effectuant ce geste par exemple.
Ensuite oui, "chaque geste veut toujours dire la même chose", mais nous venons d'énoncer douze règles préalables à la description du geste.

Ce n'est d’ailleurs pas parce qu'un horizon de sens du geste est proposé que les chercheurs en synergologie ne continueront pas à se demander si de nouvelles règles ne permettraient pas d'affiner cet horizon de sens et même au passage de revisiter une ou l'autre de ces douze règles….

 

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Jean Charest, un corps plus parlant que les mots

 

Le 1er août 2012, le premier ministre du Québec Jean Charest, dans une atmosphère de crise a décidé de déclencher des élections le 4 septembre. Le même soir, il était à la télévision publique Radio-Canada pour répondre aux questions de la journaliste Céline Galipeau. L'interview en duplex a duré 7.02  minutes.  Il a fait la démonstration par l'image, que le corps ne parle jamais la langue de bois.

Tous les gestes du premier ministre, soit 100 % de ses gestes, ont été fait avec sa seule main droite. Tout ca aurait pu sembler très logique sauf que Jean Charest est … gaucher.

100 % des gestes de la main droite…. alors qu'il est gaucher.

Qu'est-ce que cela pourrait bien signifier ici ?

Le premier ministre a cherché à convaincre la journaliste et le public que le déclenchement d'élections au beau milieu des vacances des Québécois, est très logique, que la date n'a pas été choisie pour devancer la reprise des travaux de la Commission Charbonneau qui enquête sur la corruption dans le milieu de la construction (1), et que des élections déclenchées deux jours après la rentrée universitaire rendant difficile le vote des étudiants, n'est qu'un hasard. (2)
 
Sur 7 mns d'entrevue, le chef du parti libéral a parlé de son projet politique exactement 12 secondes en évoquant son plan pour le développement du Grand nord. Il a passé le reste du temps à essayer de justifier sa position et lorsque le corps est dans une situation de combat, qu'elle soit gauchère ou droitière, la personne communique davantage avec la partie droite de son corps, fait des gestes de la main droite.
 

L'oeil droit

 

Si la main droite s'exprime, ici l'oeil droit du premier ministre n'était pas en reste.  Il passe plus de 80 % du temps de l'entrevue à regarder la caméra avec son oeil droit. L'observation de cette réalité vous sera facilitée si vous décidez d'observer l'oreille plutôt que l'oeil (!), comme sur la seconde photo. Évidemment tout ça est très inconscient de sa part. Quiconque regarde une caméra estime bien la regarder avec les deux yeux. Mais l'hémi visage droit est toujours plus présent lorsque la personne entre en logique de combat.

Impartiale et objective, Céline Galipeau montre ses valeurs… par gestes

Céline Galipeau est une journaliste d'un grand professionnalisme. Impartiale et objective, elle serait sans doute choquée de savoir que ses propres idées puissent être lisibles. Mais il se trouve que lorsque nous faisons des gestes nous plaçons nos valeurs dans l'espace. Et elle montre sans ambiguïté sur cette vidéo, à partir de critères synergologiques (3) traditionnels, au moment ou elle les évoque, qu'elle préfère Pauline Marois à François Legault. Ses proches, les gens qui la côtoient, évalueront, apprécieront…

Peut-on fabriquer son langage corporel ?

Pour les gens qui penseraient que la gestuelle est calculée, ou que cela dépend de l’œil dominant, comparez cette vidéo à la vidéo publicitaire du parti libéral du Québec dans laquelle le premier ministre cherche à se montrer sur son meilleur jour, à partir de conditions d'enregistrement idéales. La dynamique du regard est différente, aussi bien au niveau des yeux que de celle des gestes.
D'ailleurs ces micromouvements, les personnages publics le savent bien,  ne sont pas maitrisables. (3)

Main droite et œil droit en avant, le chef du parti libéral part en guerre. Ceux qui s'attendraient à l'occasion des élections à un débat de société, assisteront sans doute davantage à un combat de société.  Nous ferons le point dans 32 jours.
 
(1) Si nous comparons les systèmes publics québécois et français les droits de scolarité au Québec sont aujourd'hui avant toute augmentation, 9 fois supérieurs par rapport à la France.
(2   Le système pré universitaire  et universitaire est paralysé par des gréves depuis prés de 6 mois.
(3) la synergologie est une discipline, possédant ses références, codes d'observation, ses modes de validation. Ce n'est pas une branche de la psychologie, ni de ce que l'on appelle parfois le "body language".
(3) le langage du corps se travaille certes, mais autrement, c'est-à-dire à partir de l'état d'esprit. Le langage du corps constitue alors un indicateur permettant de comprendre à quel point les valeurs défendues sont effectivement incarnées dans le corps,  c'est-à-dire réellement possédées. La pire stratégie consisterait de la part d'un personnage public à vouloir contrôler ses réflexes corporels. Elle serait contre-productive.

Se faire entendre avec les mains !


On a cru pendant longtemps en accord avec les manuels de savoir-vivre qu'il ne fallait pas faire de gestes en parlant car cela traduisait un manque d'éducation. Celui qui faisait des gestes montrait par ce fait même qu'il avait de la difficulté à s'exprimer. Or nous savons aujourd'hui que c'est exactement le contraire qui se passe !

Les gestes ont un double avantage. Ils permettent d'abord à celui qui les effectue en parlant , de livrer des informations émotionnelles ou concrètes associées à la communication verbale, mais il y a plus important encore. Le cortex auditif gauche lorsque nous sommes au repos fonctionne à environ 40 hertz et pendant ce temps la zone corticale commandant les mouvements de la main est égale à 4 hertz. Or les personnes qui parlent avec les mains sont souvent plus faciles à comprendre parce que leurs gestes les conduisent à adopter un rythme syllabique voisin de 4 hertz, qui est plus facilement analysable par le cerveau des auditeurs ! (1)
 

Cherchez autour de vous un bon communicant qui ne fasse pas de gestes en parlant, vous verrez, c'est rare…!

Ce n'est sans doute pas un hasard si les gestes de la main et les fonctions cognitives associées au langage ont évolué en même temps dans des territoires cérébraux contigus l'un de l'autre. La locution "prendre la parole", ne dit pas autre chose…
 
(1) B. Morillon et al., "Neurophysiological origin of human brain asymmetry for speech and language", in Proc. Natl. Acad. Sci. USA., vol. 107(43), pp. 18688-93, 2010