Archives pour la catégorie Personnalités

L’effet Pygmalion et Françoise David

Dans ce blogue, nous allons décrire le phénomène qui permet de comprendre que le fait de gagner un débat politique, du type du débat des chefs de ce soir, n'est pas lié directement avec la qualité de la prestation des chefs. Et qu'en outre, le langage corporel est central dans ce processus.

Ce soir, 27 mars 2014, au Québec, le second débat va opposer les quatre principaux dirigeants de partis québécois dans leur course pour devenir Premier ministre du Québec.
Comme dans tout débat, des spécialistes vont être conviés à donner leur avis sitôt le débat terminé, et avant même que les sondages ne s'en mêlent, tenter de répondre à cette question : Qui a gagné le débat ?

Lire la suite

Obama Romney ou Obama Mc Cain : Les six débats gagnés dés la poignée de mains

 

     Le seul débat perdu par Obama
    Romney tient l'avant-bras d'Obama

Il est dit que la première impression décide souvent de la nature d'une relation, et la plupart des auteurs s'accordent à dire qu'elle se fabrique dans les esprits en moins d'une seconde, c'est dire son importance. (1) 

Dans les débats politiques, un seul moment permet d'observer les leaders d'un seul regard, c'est le moment où ils se serrent la main.  Ensuite durant toute la durée du débat le regard du téléspectateur ira sans cesse d’un candidat à l'autre mais il n‘aura plus l’occasion de les embrasser tous les deux d’un seul coup d’œil. La poignée de mains filmée n'est donc pas un élément d'interprétation à négliger. 
 
Barack Obama a institué un nouveau code de communication à ce moment stratégique de la rencontre : le fait de toucher son adversaire avec l'autre main que celle de la poignée de mains dès la rencontre. Personne ne l’avait fait avant lui. Dans les premiers débats, les candidats étaient déjà assis au moment de la prise d'antenne de la  télévision. Ensuite dans la période des débats Bush-Clinton, ils ont commencé à se saluer debout sur le plateau en se serrant la main, mais  personne n'avait donc encore osé poser sa main sur le bras ou l'épaule de son concurrent et marquer ainsi son empreinte sur lui en début de rencontre. 
C’est avec le sénateur Mc Cain que Barack Obama, dès son premier débat a bousculé la règle qui voulait que les adversaires politiques ne se touchent pas. Trois fois durant les trois débats il posa la main sur l'épaule ou le bras de Mc Cain, et la laissa ainsi déposée sur lui, bien visible à l'œil de la caméra après que l'autre ait cessé de lui serrer la main. Il gagna les trois débats. La règle observée dans le monde animal, voulant que le dominant marque sa domination par son toucher prononcé, semblait pouvoir s'appliquer à l’être humain au grand plaisir de feu Charles Darwin.
 
Dans les débats l'opposant à  Mitt Romney, les sondages ont donné Barack Obama vainqueur à la fin du débat deux fois sur trois, et il resta la main déposée sur son adversaire, après que l'autre se fut retiré… deux fois sur trois.
Barack Obama a perdu le premier débat et c’est précisément lors du premier débat que Romney a gagné "le duel" des poignées de mains. Sur la première photographie en bas à gauche, M. Romney continue de tenir l'avant-bras de Obama, alors que celui s'est retiré.
Dans les deux débats suivants la situation s'est inversée. Obama lui même reconnaît avoir perdu ce premier débat.
 
 
Et les cours de communication alors.. !
 
Les codes de la dominance sont bien connus de tous les leaders qui ont tous pris nombre de cours de communication leur permettant de faire à coup sûr la meilleure première impression. Le seul problème c'est qu'ils ont tous pris le même type de cours et le vrai dominant reste et restera celui qui est le vrai dominant. Ce n'est donc pas en prenant des cours de poignées de mains que le leader s'affirmera, contrairement à ce qu'on chercherait parfois à nous dire. Mc Cain avait bien essayé de rivaliser sur la durée de la poignée de mains avec Obama, mais il est arrivé un moment où mal à l'aise il a éprouvé le besoin de se retirer, alors qu'Obama continuait à tapoter tranquillement son épaule. 
 
Il est intéressant de noter qu’un gagnant de débat peut très bien être identifié par un public  regardant le débat, le son de sa télévision, coupé.  
Du point de vue de l'orateur, L’argumentation est sans doute moins importante que la confiance qu'il développe. Sa confiance en lui colore son discours et c'est elle qui lui permet d'être reconnu comme vainqueur au terme de la joute verbale. 
 
 
 
(1) Bar,M, Neta,M andLinz, H. (2006) Very First Impression.  Emotion, Vol. 6, No. 2, 269–278

Tous les ministres qui tirent la langue ne sont pas mal élevés.

 
 
Montréal, dimanche soir 30 septembre, plateau de l'émission :  Tout le monde en parle.

Le ministre de l'économie du Québec, Nicolas Marceau est en entrevue face à l'animateur Guy.A.Lepage et à son complice Dany Turcotte. Certaines entrevues sont rythmées par une question clé,  au nom évocateur "La question qui tue "!  Et ce soir, aux alentours de 21h15, la question qui tue est pour Nicolas Marceau : 

Lire la suite

L’aile gauche du nez de Lucien Bouchard


Le contexte
 

À l'occasion de la sortie de son livre "Lettres à un jeune politicien", Lucien Bouchard, ancien premier ministre du Québec, explique ici au plus jeune député de l'Assemblée Nationale jamais élu, Léo Bureau-Blouin (20 ans) qu'il faut "tenir compte de ce qui se passe dans la population...". Au moment précis où il emploie ces mots, il se gratte l'aile gauche du nez.

 

Pourquoi se gratte-t-il l'aile gauche du nez ?

 

L'ex premier ministre a répété toute la journée, lors de chaque entrevue réalisée: "un gouvernement ne doit jamais céder devant la rue", évoquant les manifestations de ce qu'il est convenu d'appeler aujourd'hui le "printemps érable" au Québec.

Il conseille pourtant au nouvel élu qui a aussi été un des trois leaders étudiants de ce printemps érable: "Il faut tenir compte de ce qui se passe dans la population" Or,  ce conseil est en contradiction avec l'essentiel de ses déclarations de la journée. Avouons qu'il est difficile de dire du même souffle qu'il " faut tenir compte de ce qui se passe dans la population" et  "qu'il ne faut pas céder à la rue" (1). Car c'est bien la population qui est dans la rue…

 

Ce geste de  Lucien Bouchard, se gratter l'aile gauche du nez qui le pique, exactement au moment ou il emploie l'espression tenir compte de la population exprime la contradiction inconsciente de son discours. Cette microdémangeaison est typique et facilement  identifiable. (3mns 21 après le début de l'entrevue). Il se gratte en parlant, le cerveau a sans doute détecté cette contradiction du discours. (2)
 

Le fait de se gratter lui permet de détourner le regard, de se cacher subrepticement avec la main pour revenir dans son monde, évitant ainsi d'avoir l'air incohérent, face à son interlocuteur. Répétons que tout cela ne se fait pas consciemment. C'est plutôt procédural, c'est-à-dire automatique.

 

 

Cette microdémangeaison n'est pas liée au "mensonge". (3) L'ancien premier ministre  ne ment pas, il n'est simplement pas en phase avec ce qu'il a dit abondamment ici et là. En plus, il parle sur le ton du conseiller s'adressant au néophyte. Ce qui tombe assez mal…

 

 
 
 
 
 

(1) Propos tenus par exemple dans le journal de 22h00 de Radio Canada, face à Céline Galipeua le 12 septembre 2102.
(2) Evidemment les hagiographes de Lucien Bouchard nous expliqueront qu'il n'y a pas là de contradiction mais d'un point de vue strictement sémantique  il y a contradiction et d'ailleurs il se gratte précisément ici. Le cerveau a repéré la contradiction dont il n'a sans doute pas explicitement conscience, mais il se gratte…

(3) Si ca avait été un mensonge, c'est le dessous du nez qui aurait été piqué. Dans les bases de données (A_0_D_n_20_P2_56), ici c'est l'aile extérieure (A_0_D_N_3_P2_56)

 

Ingrédients infaillibles pour rater une pub ?

Le public, de manière générale a tendance à penser que les gens de publicité sont très au fait de tout ce qui concerne le langage corporel et qu'ils intègrent ces réalités dans leurs publicités. Or c'est là en partie une croyance.

Par une série d'observations tirées de publicités diverses, nous allons vous montrer quelles erreurs commises par méconnaissance de la dynamique du langage corporel ont tendance à produire sur le public l'effet contraire à l'effet recherché. Observons cette publicité. associant un grand acteur à une publicité pour le café dans une ambiance mystérieuse.

 

Le cerveau fait des associations libres, ce qui permet à l'être humain d'avoir des réactions plus rapides et mieux adaptées face à son environnement. Le marketing puise nombre de ces astuces dans ce type de construction théorisée par Freud. Une association libre bien connue associe café et sexualité.  Ici le breuvage est placé entre les mains de l'acteur au sex appeal (« appel du sexe » en anglais littéral) ) reconnu et devrait donner pour le moins le goût de la torréfaction à son public.

Mais il se trouve que si vous regardez son visage, dans les yeux de l'acteur, c'est d'abord le blanc de l'oeil sous l'oeil qui est surtout visible. Or ce muscle abaissé sous l’œil se rétracte pour découvrir la sclère,  lorsque les personnes sont anxieuses

 

Lorsque les personnes sont excitées, notamment sexuellement, le petit muscle appelé orbicularis oculi, a tendance au contraire à se bomber et remonter sur l’œil pour cacher la sclère c'est-à-dire le blanc de l’œil. 

Par comparaison, une personne excitée postivement, même si sa tête descend ne montre pas le blanc de l'oeil sous l’œil lorsque elle baisse la tête. La seconde photo permet d'observer la différence. 


 Des réalités qui ne sont pas conscientes mais qui sont pourtant bien réelles :

Ce phénomène n'est pas subjectif. Le simple fait de regarder des images d'yeux dans lesquels la sclère est bien visible sous l’œil suffit à déclencher le fonctionnement de l'amygddale cérébrale (une zone du cerveau située dans le système limbique) normalement activée dans les situations de peur ! (1)
Le décodage que le cerveau fait de la sclère n'est pas conscient. Personne ne va intentionnellement  observer la présence ou non de la sclère (le blanc de l'oeil) chez son interlocuteur ou interlocutrice, en revanche l'activité cérébrale de ces personnes montre que les zones normalement activées en situation de peur s'activent lorsque les interlocuteurs découvrent le blanc de leurs yeux. (3)

C'est exactement ce qui se produit ici. Le visage de l'acteur  à la tasse de café,  bien aimé du public ne fait pas peur c'est certain, mais l'effet de mise en confiance et de désir ne peut pas jouer à plein son rôle, car cette image fait naitre, non consciemment, davantage de vigilance que le désir dans le cerveau des gens qui regardent…

Ici le langage corporel crée un effet que les publicistes n'ont pas contrôlé, faute de le connaître, et l'acteur de son côté n'est pas en situation de désir parce que si ça avait été le cas, sa sclère n'aurait  pas été si visible…

Paradoxe : On peut fabriquer l'authenticité mais on est bien plus authentique lorsqu'on ne fabrique pas 

Cette publicité nous entraine au coeur d'un paradoxe : On peut toujours essayer de fabriquer l'authenticité, mais que de paramètres à contrôler. Dans la vie de tous les jours une démarche de communication juste devrait être toute autre.  Les trucages du langage corporel sont trop nombreux et trop compliqués, parfois même impossibles à mettre en œuvre. On ne peut pas apprendre à remonter l'orbicularis oculi sous l’œil pour avoir l'air de désirer l'autre ! 
Une démarche de communication juste devrait être même strictement inverse, fondée sur le rejet des trucages.(4) D'ailleurs le simple fait de développer le désir de regarder l'autre, pour mieux le comprendre, fait naitre des mécanismes d'empathie qui amènent la relation à être juste sans avoir besoin d'être bricolée…

 

(1) Morris, J.S., De Bonis, M.  Dolan, R.J., (2002) « Human amygdalia responses to fearfull eyes », Neuroimage, 17, (1), pp. 214-222.
(2) Zajonc R, feeling and thinking, preferences need to inferences, American Psychologist, 35, 1980,
(3) Whalen, P.j Rausch, S.L,  Etchof, N.L, mc Inerney, S,Clee, M.B, Jenike, M.A (1998) . masked présentations of emotional facial expressions modulate amygdalia activity without explicite knowledge, Journal of neuroscience, 18, p.411-418. 
(4) Turchet, P. Les codes inconscients de la séduction,  Ed de l'homme, 2004, 167 pages.

 

Le conflit étudiant dans les yeux de Jean Charest

Le 30 août sur RDI au Québec, les principaux chefs politiques ont eu 300 secondes chacun pour répondre aux questions de la journaliste Anne-Marie Dussault.  Commentant sur le vif ces 5 débats, j'ai été amené à dire que le premier ministre avait eu un moment difficile, un seul observable, celui où il parla du "conflit étudiant".
 
Bien préparé, le chef libéral dont la communication générale est plutôt de bonne qualité, est resté souriant et plutôt détendu. Si nous en restons à ce niveau de communication, il n'y a rien à dire de particulier.  Mais le langage corporel traduit immédiatement nos états d'âme . Il les exprime sur certaines parties du corps sans filtres, simplement parce que le déplacement de certains muscles échappe à notre contrôle conscient. C'est le cas de la partie inférieure de l'orbicularis oculi plus simplement appelée en synergologie fente palpébrale inférieure.
 
La première photographie "conflit étudiant" est mise à côté d'une photographie prise à un moment aléatoire du débat. Les flèches indiquent les zones lisibles des manifestations de l'anxiété.
 
Qu'est-ce que cela signifie  ?
 
Les mots que nous employons ne résonnent pas dans nos cerveaux pour chacun d'entre nous avec la même tonalité affective.  Certains mots sont très chargés émotionnellement, positivement ou négativement.  Ici, sur aucun sujet abordé, J. Charest n'est vraiment mal à l'aise, sauf sur le conflit étudiant. Il ne le dit pas, mais le phénomène est bien visible sur la zone de ses yeux.
 
Les étudiants en grève depuis 6 mois ont milité pour que le chef du gouvernement ne soit pas réélu. Auront-ils eu raison ou non  ? Les urnes seront seul juge.  En revanche ce qui est certain, c'est que psychologiquement ils ont effectivement déjà eu raison dans l'esprit du premier ministre. Lorsqu'il évoque le "conflit étudiant", malgré lui une anxiété monte en lui et cette anxiété se voit.
 
Les règles qui vous sont proposées dans ce blogue sont vérifiables. C'est d'ailleurs dans cet objectif qu'il a été construit. Il suffit aux personnes intéressées de retourner sur ces 300 secondes pour se rendre compte que nulle part ailleurs dans la vidéo, le blanc de l’œil sous l’œil  n'a été visible comme il l'est sur les mots et le thème "conflit étudiant".
 
 
 
 
 
 

Comment communique Pauline Marois ?

Le lendemain du premier des débats des chefs, au Québec, j'ai dit dans plusieurs médias que Pauline Marois était restée sereine durant tout le débat et plusieurs fois la même question m'a été adressée : "Ne serait-ce pas là un effet des interventions esthétiques (botox, infiltrations ou autres) qui ont tendance à gommer les dissymétries faciales et créer une expression de calme sur le visage?" Non.

Cette photographie de Pauline Marois est tirée du débat des chefs. Ce visage est ridé. C'est celui d'une femme de 64 ans. Des sillons sont visibles sur tout le visage, et la peau tombe sur le coin de ses paupières. Il est possible que la première ministre du Québec ait subi des traitements relevant de la chirurgie esthétique, mais il ne serait pas honnête de mettre la sérénité de la cheffe du parti québécois sur le compte d'autre chose que de la qualité de sa communication. D'ailleurs l'effet direct de la chirurgie esthétique est mesurable. C'est un effet de rigidité, pas de sérénité.


Qu'est-ce qui permet de dire que Pauline Marois avait l'air sereine ?
 
Entendons-nous bien, nous ne parlons pas ici de rhétorique politique, ce n'est pas l'enjeu. Nous parlons ici de la stricte communication de Pauline Marois.
Dès le démarrage du débat , Pauline Marois a dit "bonsoir" aux animatrices et sa bouche est restée entrouverte ensuite, signifiant sa détente intérieure. Elle est la seule des quatre chefs a avoir agi ainsi. Dans le même mouvement, elle cligna des paupières pour saluer les animatrices. La personne qui cligne des paupières fait entrer des images de l'autre dans son cerveau, traduisant très inconsciemment l'ouverture.  Là encore, elle est la seule, avec Jean Charest, à avoir réagi ainsi. Dans le premier segment, celui de la première prise de parole d'un temps identique pour tous les candidats, elle cligna 39 fois des paupières, comme Jean Charest, contre 9 fois chez François Legault. Elle était sereine, confiante. Les items corporels le traduisent hors de tout doute raisonnable. 
 
Elle ponctua son discours de gestes et tous ses gestes, en début de débat, ont été faits de la main gauche, alors qu'elle est droitière. La main gauche est connectée aux aires cérébrales du lien (1). On n'apprend pas à parler en utilisant la main gauche, cela se produit ou non selon les états émotionnels ressentis au moment du geste (2). Si ces mouvements  pouvaient s'apprendre, tous les leaders parleraient avec la main gauche. Il a fallu en réalité attendre 9,25 minutes pour que la main droite de Marois apparaisse.
Des quatre leaders, lorsqu'on les évalue, c'est elle qui a communiqué avec les gestes les plus hauts. Cette manière de faire est conforme aux observations montrant qu'en situation de dialogue, les leaders font toujours des gestes plus hauts que leurs collaborateurs. Ces études n'étant d'ailleurs pas contredites.
Si l'on considère l'espace occupé, c'est également elle qui s'est le plus déplacée, se tournant largement à droite et à gauche pour répondre à ses interlocuteurs. 
 
Et les deux autres débats
Dans les deux autres débats, certains commentateurs, sans nier le fait qu'elle ait pu être sereine, ont trouvé à certains moments Pauline Marois plus molle. Le rappel de certains  stéréotypes culturels est à ce égard on ne peut plus éclairant. 
Face à deux hommes à la voix forte et affirmée, il y a un moment ou une femme ne peut plus continuer à rivaliser dans les tons graves, sans risquer de voir son comportement qualifié d'hystérique (3). Pauline Marois se trouvait là face à un problème à solutio unique. Elle n'avait pas d'autre choix que de laisser finir celui qui coupait la parole, pour redémarrer ensuite sur un autre ton. Et ce, dans les deux débats avec Jean Charest et François Legault

 
Dans ces circonstances, la principale tâche d'un animateur digne de ce nom, ici Pierre Bruneau  de faire respecter le dialogue, c'est même la base de son métier. Ici sa fonction exigeait qu'il arrête les leaders trop impétueux. N'oublions pas que couper la parole est une technique de communication vieille comme la communication elle-même, et qu'elle est une technique efficace car celui qui parle le plus fort ou celui qui est le dernier à parler, est souvent perçu comme celui qui a raison, celui dont la parole est légitime. Or, ici l'animateur n'est jamais intervenu. 
Dans l'histoire des débats, aussi bien aux États-Unis qu'en France, jamais un animateur n'est si peu intervenu pour faire respecter le droit de parole.
 

Lorsque nous nous attardons aux indicateurs corporels et que nous établissons ainsi des comparaisons entre Pauline Marois et les autres chefs (ampleur de la gestuelle, hauteur des gestes, utilisation inconsciente de la main gauche ou de la main droite, forme du geste, déplacements faciaux, clignements de paupières, ouverture et mouvements de bouche, rotation de la tête, congruence mots-corps ), la communication de Pauline Marois a été de très haute tenue. Il faut passer, dépasser les enjeux idéologiques pour le dire ou le reconnaitre.

 

 

(1) Iaccino (1993) Left brain, right brain, différences inquiries, évidence and new aproaches, Hillsdale (N.J) . Lawrence Ernbaum, Associates 
(2) Feyereisen. P (1994): Le cerveau et la communication , Coll “ Psychologie d’aujourd’hui ”, P.U.F,  213 pages.
(3) Le ton, le timbre et l'intonation de la voix sont des composantes du langage non verbal. Seuls les mots sont ce qu'il est convenu d'appeler le verbal. Mehrabian A. (1972)  Nonverbal communication, Chicago, Aldine-Atherton , 1972.

Jean Charest, un corps plus parlant que les mots

 

Le 1er août 2012, le premier ministre du Québec Jean Charest, dans une atmosphère de crise a décidé de déclencher des élections le 4 septembre. Le même soir, il était à la télévision publique Radio-Canada pour répondre aux questions de la journaliste Céline Galipeau. L'interview en duplex a duré 7.02  minutes.  Il a fait la démonstration par l'image, que le corps ne parle jamais la langue de bois.

Tous les gestes du premier ministre, soit 100 % de ses gestes, ont été fait avec sa seule main droite. Tout ca aurait pu sembler très logique sauf que Jean Charest est … gaucher.

100 % des gestes de la main droite…. alors qu'il est gaucher.

Qu'est-ce que cela pourrait bien signifier ici ?

Le premier ministre a cherché à convaincre la journaliste et le public que le déclenchement d'élections au beau milieu des vacances des Québécois, est très logique, que la date n'a pas été choisie pour devancer la reprise des travaux de la Commission Charbonneau qui enquête sur la corruption dans le milieu de la construction (1), et que des élections déclenchées deux jours après la rentrée universitaire rendant difficile le vote des étudiants, n'est qu'un hasard. (2)
 
Sur 7 mns d'entrevue, le chef du parti libéral a parlé de son projet politique exactement 12 secondes en évoquant son plan pour le développement du Grand nord. Il a passé le reste du temps à essayer de justifier sa position et lorsque le corps est dans une situation de combat, qu'elle soit gauchère ou droitière, la personne communique davantage avec la partie droite de son corps, fait des gestes de la main droite.
 

L'oeil droit

 

Si la main droite s'exprime, ici l'oeil droit du premier ministre n'était pas en reste.  Il passe plus de 80 % du temps de l'entrevue à regarder la caméra avec son oeil droit. L'observation de cette réalité vous sera facilitée si vous décidez d'observer l'oreille plutôt que l'oeil (!), comme sur la seconde photo. Évidemment tout ça est très inconscient de sa part. Quiconque regarde une caméra estime bien la regarder avec les deux yeux. Mais l'hémi visage droit est toujours plus présent lorsque la personne entre en logique de combat.

Impartiale et objective, Céline Galipeau montre ses valeurs… par gestes

Céline Galipeau est une journaliste d'un grand professionnalisme. Impartiale et objective, elle serait sans doute choquée de savoir que ses propres idées puissent être lisibles. Mais il se trouve que lorsque nous faisons des gestes nous plaçons nos valeurs dans l'espace. Et elle montre sans ambiguïté sur cette vidéo, à partir de critères synergologiques (3) traditionnels, au moment ou elle les évoque, qu'elle préfère Pauline Marois à François Legault. Ses proches, les gens qui la côtoient, évalueront, apprécieront…

Peut-on fabriquer son langage corporel ?

Pour les gens qui penseraient que la gestuelle est calculée, ou que cela dépend de l’œil dominant, comparez cette vidéo à la vidéo publicitaire du parti libéral du Québec dans laquelle le premier ministre cherche à se montrer sur son meilleur jour, à partir de conditions d'enregistrement idéales. La dynamique du regard est différente, aussi bien au niveau des yeux que de celle des gestes.
D'ailleurs ces micromouvements, les personnages publics le savent bien,  ne sont pas maitrisables. (3)

Main droite et œil droit en avant, le chef du parti libéral part en guerre. Ceux qui s'attendraient à l'occasion des élections à un débat de société, assisteront sans doute davantage à un combat de société.  Nous ferons le point dans 32 jours.
 
(1) Si nous comparons les systèmes publics québécois et français les droits de scolarité au Québec sont aujourd'hui avant toute augmentation, 9 fois supérieurs par rapport à la France.
(2   Le système pré universitaire  et universitaire est paralysé par des gréves depuis prés de 6 mois.
(3) la synergologie est une discipline, possédant ses références, codes d'observation, ses modes de validation. Ce n'est pas une branche de la psychologie, ni de ce que l'on appelle parfois le "body language".
(3) le langage du corps se travaille certes, mais autrement, c'est-à-dire à partir de l'état d'esprit. Le langage du corps constitue alors un indicateur permettant de comprendre à quel point les valeurs défendues sont effectivement incarnées dans le corps,  c'est-à-dire réellement possédées. La pire stratégie consisterait de la part d'un personnage public à vouloir contrôler ses réflexes corporels. Elle serait contre-productive.

Segolène Royal et Olivier Falorni : le début d’un évanouissement

 
La Rochelle le 17 juin 2012, alors qu'elle est en débat organisé par caméras interposées avec le candidat qui vient de la battre, Ségolène Royal a une défaillance, le début d'un évanouissement. La scène dure 3 secondes. 
Sur cette photo réalisée sans trucages , on la voit s'affaisser.

 

Première photographie d'elle, elle écoute pour répondre.

Photographie suivante, ce qui a tout l'air d'une absence, d'un évanouissement, avant qu'elle ne se reprenne.


 

Ce qui fait penser à l'amorce d'un évanouissement 
 
Durant les 15 secondes qui précèdent ce semi évanouissement, Ségolène Royal cligne 17 fois des paupières, montrant qu'elle écoute ce que dit son rival vainqueur. Les clignements de paupières permettent d'intégrer l'information pour la faire entrer dans le cerveau et la conserver.
Elle cligne intensément des paupières, parce qu'elle écoute la réponse d'Olivier Falorni à la question du journaliste qui lui a demandé s'il allait remercier Valérie Trierweiler pour son tweet d'appui.

Et lorsqu'elle cesse de cligner des paupières donc d'écouter alors qu'elle devra répondre ensuite, c'est parce qu'elle a une absence, c'est en tous les cas la situation la plus plausible.
Rien ne permet d'ailleurs d'expliquer que tout à coup elle disparaisse sous la caméra comme elle le fait.
 
Ségolène Royal tombe de son piédestal tout à fait physiquement … trois secondes…seulement trois secondes.
Elle aurait pu choir, mais non. Cette scène rochelaise est en elle-même une métaphore.
 
Si vous êtes intéressé par les 23 secondes de cette vidéo, c'est ici 

 

 

 
 

Pourquoi le mot "élections" fait-il sourire Jean Charest ?

Trois photographies faites en moins d'une demi seconde
Au Québec en ce moment des manifestations rythment la vie quotidienne, certaines sont importantes, l'une d'entre elles a même été décrite par les observateurs comme la plus importante de la vie du Québec, réunissant plus de deux cent cinquante mille personnes à Montréal le 22 mai 2012.
La popularité des manifestations semble tenir à un double fait. Les étudiants refusent la hausse des droits de scolarité et ils le disent en manifestant, mais au delà de cet état de fait, une loi spéciale modifiant le droit de manifester a amené une partie de la population à se solidariser avec le mouvement étudiant.
 
Élection et sourire
 
Quatre jours de discussion entre les leaders étudiants et le gouvernement représenté par sa ministre de l'éducation se sont soldés le 31 mai par un échec des négociations.
Le premier ministre du Québec s'est exprimé dans les heures qui ont suivi cet échec sur les ondes de la télévision d'Etat Radio Canada répondant aux questions de la journaliste Céline Galipeau.
 
Il a expliqué notamment qu'il y aura, à un moment ou à un autre, des élections,  et les gens pourront se prononcer. Au moment où il employait le mot "élections", une expression curieuse traversa son visage durant 1/4 de seconde. Le premier ministre employait le mot "élection" et sa bouche gauche s'est mise à sourire. ( 3mns 44 aprés le début de l'entrevue). 
 
Sur le visage humain,  le sourcil droit et la bouche gauche sont les plus difficiles à contrôler consciemment, et ceci que nous soyons gauchers ou droitiers. Ici la bouche gauche sourit. C'est subreptice mais observable.
 
Il n'est pas dans la fonction du synergologue de commenter ce sourire masqué sur le mot "élections".  Mais on peut se demander pourquoi le mot "élections" fait sourire Jean Charest ?
Il n'est pas non plus dans la fonction du synergologue de sous entendre  que le pourrissement de la situation pourrait renforcer le leadership du premier ministre…
Souvenons-nous qu'en France par exemple le général de Gaulle est sorti très renforcé des manifestations étudiantes de Mai 68; le parti au pouvoir au Canada de la crise d'octobre 1970.
Non, un synergologue ne pourrait pas parier sur tant de cynisme. On lui objecterait qu'il ne connait rien à la politique. Alors il se contentera de sourire du sourire gauche du premier ministre québécois. A aucun autre moment dans cette entrevue, le premier ministre n'a souri.
 
Les paroles prononcées par le premier ministre :
"Il n'y  pas de raisons pour lesquelles il devrait y avoir une crise sociale d'abord… mais oui…il a des gens qui vont choisir de manifester ils ont le droit de le faire à la condition évidemment qu'ils respectent les autres pour que ça se fasse pacifiquement, maintenant il y aura des élections au Québec d'ici les 18 prochains mois…."