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Coupe du monde et traumatismes

Le 15 juillet 2018 pendant la finale de la Coupe du monde de football, un joueur croate a eu la très mauvaise idée dès le début du match de marquer un but contre son camp, donnant à la France l'occasion de mener au score et de prendre l'avantage à ce moment du match.
Or il a été repéré en synergologie et consigné sur vidéo, qu'une personne évoquant verbalement un traumatisme psychologique le fait en accompagnant son discours de petits mouvements rotatifs de la tête. Voyons comment réagit le joueur lorsqu'il se rend compte sur grand écran, qu'il n'y a pas de doute possible et qu'il est bien l'auteur fautif du but.

Pour Mario Mandzukic le joueur qui offre l'avantage du score à son adversaire, la situation était traumatisante. Le phénomène visuel est fin mais il est très facile à observer pour qui a été formé à l'observer. Il s’agit de 4 petits mouvements de gauche à droite au début de la vidéo et la même séquence à la fin de cette vidéo. (Si vous avez de la difficulté à repérer ce phénomène, enlevez le son de votre ordinateur pour regarder). Il faut noter également que ce phénomène n’est visible chez aucun de ses partenaires et aucun des adversaires.
Au moment où de la production des axes de tête rotatifs, le joueur a arrêté de cligner des paupières. Il est dans ses pensées, fermé aux informations extérieures. Il n'est pas nécessaire d'être grand clerc de la communication pour comprendre qu'il se remémore l'action de jeu.

Ces rotations sont généralement observées lorsque les êtres humains parlent et on pouvait se demander à bon compte si ces mouvements rotatifs n'étaient pas une façon de renforcer le traumatisme verbalisé en l'appuyant d'une négation. Or ici le joueur ne dit rien mais les mouvements sont si rapides qu'ils ne peuvent être produits intentionnellement.
Le traumatisme psychologique est repérable sur une base corporelle. Dans l'absolu, il est très possible que ces mouvements rotatifs rapides naissent précisément pour se débarrasser des traumatismes. Des données neurologiques en attestent.

Nous reviendrons plus tard sur une autre observation aussi intéressante observée pendant le même match.

La synergologie et les faits

CaptureLa synergologie permet de mieux comprendre l'être humain  à partir de son langage corporel. Son cadre explicatif l'oblige à respecter deux paramètres. D'abord, décrire le plus précisément possible la réalité pour en faire émerger des phénomènes qui n'avaient pas été observés jusque là. Ensuite, offrir la possibilité à d'autres chercheurs de réfuter, critiquer les propositions émises sur des bases scientifiques constructives.
En synergologie, la théorie des microdémangeaisons se prête bien à ce type de démonstration.  Le schéma  accompagné de points, permet de visualiser la topographie des zones sur lesquelles les personnes se passent la main lorsqu'elles se grattent le visage.

Une microdémangeaison spécifique effectuée sur le bout du nez (zone N10) permet de penser que la personne qui l'effectue est curieuse. Curieuse de voir, curieuse de savoir, curieuse de comprendre, bref curieuse.

Émettre l'hypothèse que la personne est curieuse lorsqu'elle applique sa main sur le haut de son nez pour le caresser ou le gratter, est l'explication la plus logique en l'état des connaissances.

Dans la zone du nez, huit microdémangeaisons font ainsi l'objet d'horizons de sens différents; chaque zone touchée, grattée ou caressée inconsciemment exprime un non-dit.

La vidéo précédente peut être mise en perspective avec une autre attitude, celle où la personne se gratte à l'aide de la pince pouce-index sous le nez en l'obturant. Ce mouvement traduirait un malaise  :  "Il y a un problème".  Et bien évidemment ce geste est inconscient.

La proposition consistant à comprendre qu' "il y a un problème" lorsque la personne effectue ce type de microdémangaison, constitue aujourd'hui l'explication la plus plausible. Elle est née de l'observation de situations récurrentes. 1260 items classifiés forment aujourd'hui le corpus de la synergologie et regroupent tous les aspects du langage corporel.

Des milliers de vidéogrammes représentant des situations observées in vivo sont ainsi stockés dans des bases numériques pour être comparés, enrichis tous les jours par des sources nouvelles. De ces comparaisons est né au fil du temps un corpus de  propositions stables.

Un des objectifs de la synergologie est de comprendre et de montrer à quel point le corpus gestuel est universel. Ce qui ne veut évidemment pas dire que chaque culture n'a pas son système symbolique conscient. Toutefois, à un niveau infra-conscient, il semble bien que les réactions corporelles humaines partagent toutes des codes communs.

Pendant longtemps, les biologistes ont pensé que les microdémangeaisons permettaient d'inhiber des zones de la douleur, et que c'est dans les occasions de malaise que nous nous grattions. Mais très récemment, Mishra et Hoon (2013) ont repéré que les circuits de la douleur et ceux de la démangeaison sont distincts, et qu'un polypeptide, le nppb serait à l'origine des démangeaisons. Ces découvertes issues du champ de la neurobiologie s'accordent bien avec les observations synergologiques, de nombreuses microdémangeaisons engendrées par des évènements à valence positive générant à leur tour une excitation positive. Ce qui est le cas d'ailleurs sur certaines situations présentées sur la première vidéo. 

Dans le champ du langage corporel, il n'existait avant la synergologie aucune autre base d'identification des lieux précis des microdémangeaisons, et aucune proposition d'horizon de sens réfutable. Des chercheurs avaient bien remarqué que les gens se grattaient sans raison apparente, Morris (1967), Cosnier (1977) Ekman et Friesen (1969) Kimura (1976) notamment, et ils sont loin d’être les seuls. Mais aucun d'eux ne s’était jamais intéressé précisément à mettre en lien l'état responsable de la microdémangeaison avec la topographie stricte de ces mouvements. Or, le corps humain ne fait jamais rien sans raison. C'est le principe de base de l'homéostasie (Claude Bernard, 1865). Les gestes sont donc toujours forcément signifiants.

Pourquoi ces phénomènes n’avaient-ils pas été observés auparavant, s’ils sont si clairs ?

Un postulat de la communication non verbale veut que le geste soit lié à la parole. Or ce postulat en a complètement occulté un autre : le geste lié à la pensée. Car il suffirait que le geste ne soit pas lié à la parole, qu'il soit lié à la pensée pour que le langage corporel soit observé sous un prisme différent. Dans les deux exemples vidéo précédents, c'est la nature différente des pensées (et non des paroles) qui est à l'origine de deux types de microdémangeaisons différentes. C'est l'option la plus logique en l'état des connaissances.

La  théorie des microdémangeaisons  permet d'amorcer ainsi une réflexion sur des aspects du langage corporel qui n'avaient jamais été abordés sous cet angle là,  alors qu'ils sont fondamentaux pour comprendre l'être humain et créer des interactions plus riches.

 

Ce message est tiré d'une communication présentée l'Université de Nancy-Lorrraine aux 2èmes Journées d’études du réseau Duplication, Implication, Réplication, réseau international et multidisciplinaire de chercheurs en communication et en sciences sociales, le 9 juin 2015 qui proposait une réflexion sur les formes de duplication et d’engagement dans l’environnement numérique.

 

Bibliographie

Bernard, C (1865) Introduction à l'étude de la médecine expérimentale.

Dahan, G., & Cosnier, J. (1977). Sémiologie des quasi-linguistiques français. Psychologie médicale, 9(11), 2053-2072.

Ekman, P., & Friesen, W. V. (1981). The repertoire of nonverbal behavior: Categories, origins, usage, and coding. Nonverbal communication, interaction, and gesture, 57-106.Kimura, D. (1976) « The neural basis of gesture », dans Whitaker , H. et Harry A. Studies in neurolinguistics, vol. 2, Academic Press, 1976, p. 145- 156.

Kimura D., (1976): “ The neural basis of gesture ”, In H. Whitaker et H.A Whitaker : Studies in neurolinguistics, 1976 , Vol 2 (pp. 145-156).

Meguerditchian, A. (2009) Latéralité et communication gestuelle chez le babou et le chimpanzé : à la recherche des précurseurs du langage, Thèse 2009.

Mishra, S. K., & Hoon, M. A. (2013). The cells and circuitry for itch responses in mice. Science, 340(6135), 968-971.

Morris, D. (1967). Le singe nu (1967). Paris, Grasset.

 

 

 

 

La synergologie, un nouveau paradigme

La synergologie est une discipline nouvelle et populaire. Elle se trouve, de fait prise entre deux feux : ceux qui ratingvoudraient en négliger la nouveauté parce qu'introduire de la nouveauté oblige aussi à écarter quelques idées au passage, et ceux qui pensent que tout ça n'est pas nouveau, d’autant que beaucoup de travaux existent dans le champ du non verbal.

La synergologie est apparue dans le champ de la communication non verbale au moment d'un changement de paradigme.

La connaissance  traditionnelle du langage "non verbal" est basée sur deux postulats   :

  1. Le langage corporel est le langage qui accompagne le langage verbal.
  2. Le langage corporel est le langage des émotions.

Le propre d'un postulat est qu'il n'a pas besoin d'être démontré. En psychologie par exemple, le postulat de base veut que le psychisme de l'être humain le définisse. Evidemment s'il s'avérait que le psychisme n'existe pas, l'édifice psychologique s'effondrerait de lui-même. Mais en attendant ce postulat est bien solide. Pour les sociologues le postulat de base veut que les  rapports sociaux soient structurants pour l'individu. Chaque discipline repose ainsi sur un certain nombre de postulats qui n’ont pas à être discutés, parce que c’est autour d’eux que la discipline se forge.

Or les deux postulats précédents relevant du non verbal, et tenus pour vrais pendant très longtemps ont besoin d’être réexaminés aujourd’hui, à la lueur des observations faites grâce aux moyens modernes d’investigation.  Ils obligent à considérer la dimension corporelle du langage non verbal un peu différemment.

Reprenons les deux postulats issus du paradigme traditionnel :

1. Le langage corporel accompagne le langage verbal.

Le langage corporel dans le champ académique c'est ce qu’on appelle le plus souvent la gestuelle, et évidemment la gestuelle accompagne le langage verbal. A ce titre, il est dit que le langage corporel est co-verbal.  D’un certain point de vue, comme les propos sont généralement accompagnés de gestes, tout ça fait tellement de sens qu’il ne semble pas y avoir de raison de remettre en question un postulat si évident. Or aujourd’hui, au regard de l'imagerie cérébrale autant que de certaines expériences plus traditionnelles, la dimension « co verbale » du langage du corps  semble largement marginalisée au détriment d'autres dimensions de ce langage. Prenons d'abord deux exemples. Ackerman et al (2010) ont montré que lorsque deux personnes négocient sur des chaises molles, elles négocient plus mollement que si elles négocient sur des chaises dures (!). La texture des chaises est reconnue par le corps qui envoie des messages au cerveau. Chen et al, (2001) ont observé de leur côté que les personnes qui avaient des objets rugueux dans les mains négociaient plus âprement que celles qui avaient  des objets mous. D'autres expériences de ce type existent, elles traduisent le fait que les sensations envoyées par le corps préparent le cerveau à penser comme il va le faire.  Le message envoyé par le corps aura un effet sur la teneur du message verbal,  le corps (en fait les zones sensorimotrices du cerveau reliées plus directement au corps) prépare la personne à penser ce qu’elle va dire, bien avant qu'elle ne le dise.

Toutes ces expériences faites dans d’autres champs que celui du non verbal proprement dit, permettent de comprendre que le langage corporel n'accompagne pas le langage verbal mais qu'il le précède. Il prépare de manière non consciente pour elle la personne à dire ce qui ne va émerger sous forme sonore et verbale que plus tard.  Et tout le paradigme synergologique revient non pas à chercher le co-verbal, mais plutôt la trace corporelle de la pensée non consciente, qui peut déjà être observée dans certaines conditions sur le corps, à travers son langage.

Ces expériences conduisent à penser qu’un être humain peut également être traversé par plusieurs rythmes corporels qui s’entremêlent, parce que la personne peut traiter plusieurs pensées en même temps, et que toutes ces pensées n’ont pas toutes le même niveau de maturation.  Nous clignons des paupières environ toutes les 2 secondes et ne changeons de position assise que toutes les dix minutes environ. Pendant que les clignements de paupières permettent d'intégrer activement les informations venues de l'extérieur, les jambes en position assise peuvent être dans un repos presque total. Toutes les parties du corps ne sont donc pas engagées au même titre dans l'interaction, et les rythmes corporels ne sont pas co-verbaux loin de là. Ils sont pluraux.

Renverser le paradigme dominant,  c’est dire que ce n'est pas le langage corporel qui est co-verbal, c'est le langage verbal qui est co-corporel. Cette façon de voir est plus logique aujourd’hui ( Bechara et al, 1997, Damasio et al, 2000, Haynes, 2006, Gazzaniga, 2011, Chen et  Bargh, 1999,  Bargh, 1992, Chen et al, 2001, Barsalou, 1999, Bower, 1991). D’une certaine manière, « le corcept précède le concept », mais le bouleversement à introduire pour faire passer cette idée dans certains champs de la réflexion est considérable.  

Dans la réflexion sur le langage corporel, la synergologie peut jouer un rôle intéressant car ces phénomènes sont observables, ils peuvent être numérisés et comparés à condition d’avoir une grille de description du langage corporel exhaustive (nous y reviendrons dans le prochain article).  La chance énorme de ce champ, c’est qu’il est possible de passer plus facilement qu’on ne le pense de la théorie à la pratique, grâce à l’observation visuelle.

Un second postulat demande également à être discuté. Le postulat à l'effet que le langage corporel soit le langage des émotions, parce que là encore  la proposition est tellement réductrice qu’elle empêche de comprendre ce qu’est le langage corporel et à quel point il est utile à la compréhension de la relation.

2. Le langage corporel est le langage des émotions.

Certes les émotions inscrites sur le visage et le corps méritent d'être repérées et décrites avec précision mais le langage corporel ne saurait se résoudre à n'être que le langage des émotions. Il est autant le langage de la cognition que le langage des émotions. Il est autant le langage de la relation que le langage des émotions.  Une personne à l'écoute, bien concentrée dans un entretien ou une réunion d’équipe, laisse passer très peu d'émotions. Pourtant, elle dispose bien d’un langage corporel qui exprime ce qu’elle pense mais qu’un travail sur les émotions ne permet pas de rendre compte.

Là encore, dire que le langage corporel relève autant de la relation, de la cognition que des émotions, relève d'un changement de paradigme.  Une personne peut être attristée par l’attitude d’une personne qu’elle apprécie pourtant profondément. Qu'est-ce que le corps traduira-t-il à votre avis : de la tristesse ou du lien ? Et bien, il traduira les deux états en même temps. Une émotion négative et une qualité de relation.

Une personne effrayée et stressée peut, soit s’arrêter subitement  de réfléchir, soit ne pas interrompre le cours de ses pensées. Il y a là de l’émotion et de la cognition. Ne prendre en compte que les émotions, conduit à se couper de l’information corporelle la plus intéressante, celle qui veut que cette personne continue d’être présente ou qu’elle se coupe parce qu’elle est trop effrayée.  Dans un cas, vous allez continuer à dialoguer avec elle, et dans l’autre, surtout l’écouter pour lui permettre d'évacuer son mal-être. 

Si on répète comme un mantra que le langage corporel c’est le langage des émotions, on passe à côté de sa diversité. Et on passe à côté des phénomènes les plus intéressants à observer pour qui est intéressé par l’autre.

Évidemment, ce changement de paradigme oblige à la création de nouveaux outils pour analyser autrement  le langage corporel. Dire que le langage corporel est traversé par différents rythmes, sans théoriser ces différents rythmes et se donner les moyens de les observer n’aurait pas grand sens.

Dans le prochain message nous évoquerons  la démarche synergologique.

 

Bibliographie sommaire :

 

Ackerman, J. M., Nocera, C. C., & Bargh, J. A. (2010). Incidental haptic sensations influence social judgments and decisions. Science, 328(5986), 1712-1715.

Bargh, J.A. (1992). Being unaware of the stimulus vs. Unaware of its interpretation : why sublimality per sedoes matter to social psychology, in R. Bornstein & T. Pittmann Eds, Perception without awareness. New-York: Guilford.

Barsalou, L. W. (1999). Grounded Cognition. Annual Review of Psychology, 59, 617–645.Bechara, A., Damasio, H., Tranel, D., & Damasio, A. R. (1997). Deciding advantageously before knowing the advantageous strategy. Science, 275(5304), 1293-1295.

Bower, G. H. (1991). Mood Congruity of Social Judgments. In J. P. Forgas (Eds.), Emotion and Social Judgments (pp. 31–54). Oxford: Pergamon Press.

Brouillet, T., Heurley, L., Martin, S., & Brouillet, D. (2010). Émotion et cognition incarnée: La dimension motrice des réponses verbales «oui» et «non». Canadian Journal of Experimental Psychology/Revue canadienne de psychologie expérimentale, 64(2), 134.

Chen, S., & Bargh, J. A. (1999). Consequences of Automatic Evaluation: Immediate Behavior Predispositions to Approach or Avoid the Stimulus.Personality and Social Psychology Bulletin, 25, 215–224.

Clark, A. (1997). Being there: Putting Brain, Body, and World Together again. Cambridge: MIT Press. Content, A., Mousty, P., & Radeau, M

Clark, A. (1997). Being there: Putting Brain, Body, and WorldBarsalou, L. W. (1999). Grounded Cognition. Annual Review of Psychology, 59, 617–645

Damasio, A. R., Grabowski, T. J., Bechara, A., Damasio, H., Ponto, L. L., Parvizi, J., & Hichwa, R. D. (2000). Subcortical and cortical brain activity during the feeling of self-generated emotions. Nature neuroscience, 3(10), 1049-1056.

Gazzaniga, (2011) Le libre arbitre et la science du cerveau. Ed Odile Jacob, (pp 141-142)Gibson, J. J. (1977). The theory of affordances. Hilldale, USA.

Haynes, J-D. (2006). Decoding mental states from brain activity in Humans, Nature Reviews Neuroscience, vol. 7(7), pp. 523-34, 2006 Compte rendu Cerveau et psycho, n°41 septembre-octobre 2010, pp-70-72.

 

 

 

 

 

 

Vie de couple, communication non verbale et synergologie.

Une étude conduite par Richard Wiseman, psychologue à l’Université de Hertfordshire basée sur le comportement de 1000 personnes et présentée au Festival International des Sciences d’Édimbourg tend à montrer que les couples les plus unis sont également ceux dans lesquels les conjoints dorment le plus près l'un de l’autre, c'est-à-dire "collés" l'un à l'autre. Dans le cadre de cette étude, ceux qui restaient en contact physique durant leur sommeil déclaraient être heureux dans 80 % des cas, contre 68% de ceux qui gardaient une distance dans le lit.Boton cuadrado blanco simbolo noche

Certains esprits chagrins critiquent cette étude reprochant ses faiblesses méthodologiques et son approche synergologique.

Il s'avère que ce type de recherche ne relève tout simplement pas du champ de la synergologie. Mais elle nous permet en revanche de faire un peu de pédagogie sur ce qu' est et ce que n'est pas la synergologie. Il ne suffit pas en effet que l'on parle de langage corporel pour que le champ d'observation soit celui de la synergologie ©.

A priori, l'auteur de l'étude semble penser que pour éprouver la force du couple, il faille observer le comportement corporel des deux conjoints. Ce lien direct à la corporéité renvoie bien en apparence au paradigme synergologique, mais ça ne suffit pas pour qu'on puisse parler de synergologie.  Simplement parce qu'ici le chercheur n'observe pas directement la corporéité. Il propose plutôt de répondre à un questionnaire et l'étude est basée sur la déclaration et ça, ça n'est pas de la synergologie. Entendons nous bien, ça n'empêche pas l'étude d'être sérieuse, mais ca n'est pas une étude synergologique.

Pour qu'une étude soit synergologique, il aurait fallu qu'elle soit effectuée par des synergologues, formés à travailler autour de la distinction entre les instances conscientes, mi-conscientes, non conscientes. Lorsqu'une personne est interrogée par questionnaire sur son couple, elle fait une réponse consciente. Or, cette réponse peut très bien n'être pas en correspondance étroite avec la réalité de son union. Et ce, pour des tas de raisons dont le déni par exemple. Il existe, dans le champ de la science, un courant critique sur les théories de l'autoévaluation (c'est-à-dire sur ce qu'on déclare sur soi-même) dont les thèses ne sont pas sans fondement (1).

Ici par exemple, il aurait fallu pour que l'étude soit synergologique qu'elle soit fondée sur l'observation effective du couple. C'est-à-dire que ce couple ait pu être filmé, d'une manière ou d'une autre, alors que les deux partenaires étaient endormis l'un avec l'autre et qu'ensuite ils aient été filmés ensemble alors qu'ils répondaient au questionnaire par exemple. Il aurait été possible de tester leur qualité de rapprochement au moment de la réponse au questionnaire,  autour de critères liés aux petites attentions qu'ils auraient eues l'un pour l'autre, à leur insu même, à ce moment là.

Evidemment, la difficulté de mener ce type d'étude explique en partie pourquoi elle n'a jamais été conduite jusque là dans le champ synergologique. Mais ça aurait été ça faire de la synergologie.

Une tendance actuelle, parce que le langage corporel devient aujourd'hui "tendance", est de parler de synergologie  dès qu'il est question de langage corporel. Or, faire de la synergologie , c'est d'abord et avant tout 1) Utiliser un corpus de propositions  lié à la spécificité du langage corporel pour traiter l'information 2) User d'un éthogramme propre permettant de recueillir des observations précises 3) Se servir de protocoles standardisés de traitement des données liées au langage corporel et 4) Mettre en oeuvre un certain nombre de règles éthiques lors de la présentation de ces mêmes données.

Bref, pour qu'une étude soit critiquée sous un angle synergologique, il convient d'abord et avant tout de se demander s'il s'agit bien d'une recherche réalisée par des synergologues.

(1) Ledoux, J. (2005) Le Cerveau des émotions, Préface de de J.D Vincent, Ed Odile 2005, 374 pages (cf pp-52-54)

Le contexte est souvent trompeur lorsqu’on décode le langage corporel ?!


Un des reproches fait parfois à la synergologie est de ne pas prendre en compte le contexte. Les personnes qui font ce reproche à la discipline ne se doutent pas à quel point les synergologues , dans certaines circonstances, sont encore plus pointilleux à ignorer le contexte qu'elles le croient !

La prise en compte du contexte dans l'analyse visuelle provoque un biais certain appelé : Effet Koulechov….

Lev Koulechov était un théoricien russe du cinéma. En 1921, Il fit une expérience, il s'amusa à accoler le même visage relativement neutre (l'image placée en haut du blogue) face à trois situations bien différentes. une assiette de soupe , une femme morte dans son cercueil, une petite fille en train de s'amuser et il demanda à des spectateurs à qui il ne montra qu'une des trois scènes de décrire les émotions de l'acteur. Il s'aperçut alors que les sentiments qui étaient prêtés à l'acteur étaient très différents selon la scène présentée. En fait il se rendit compte que c'est le contexte lui même qui propose son expression à un visage immobile.

Hitchcock utilisait ce procédé dans ses films convaincu par l'effet Koulechov , également appelé Effet K.

La synergologie dont l'objectif est d'appréhender, à partir de la structure du langage corporel, le fonctionnement de l'esprit humain, se prémunit de cette réalité de plusieurs manières :

1. D'abord en travaillant avec un éthogramme.
C'est un outil dans lequel un certain nombre d'items corporels sont réunis et associés à une définition qui n'est pas dépendante du contexte.
(Vous devez vous demander comment c'est possible ce sera le sujet de notre prochain message blogue…)

2. Ensuite, en travaillant sur l'intégralité d'une situation à analyser.
Ceci afin de pouvoir mesurer l'évolution de l'état d'esprit de la personne à analyser.

3. En écoutant sans le son les vidéos pour se centrer sur les particularités corporelles au moment ou la personne parle.
Il faut noter que dans les test de décodage du mensonge, les gens qui regardent des vidéos sans le son obtiennent de meilleurs résultats que ceux qui décodent en écoutant le son.

Dire qu'il faut "laisser de côté le contexte" est une position qui en sciences humaines est à de nombreux points de vue (et c'est normal) politiquement très incorrecte. La synergologie émet ainsi un certain nombre de propositions qui vont à l'encontre du sens commun. Mais une discipline centrée sur le décodage du langage corporel ne peut émerger qu'à ce prix. Rompre avec le sens commun.

Le terrain de jeu des baisers.


Après les mouvements de langue et les clignements de paupières, le prince et sa princesse offrent un autre terrain de jeu à la Synergologie : le baiser.
 
En 2004 , Les codes inconscients de la séduction (1) permettaient d'expliquer qu'un baiser amoureux abandonné, authentique, se donnait de partie gauche à partie gauche du visage (comme celui de William et Kate), alors qu'un baiser tendu se donnait de partie droite du visage à partie droite du visage (comme celui de Charles et Diana).
 

En fait un certain nombre de raisons liées à la cérébralité expliquent cette réalité. Elles renvoient aux compétences de l'hémisphère droit en matière de lien. (2) Les gens qui s'abandonnent l'un à l'autre regardent davantage la partie gauche du visage de l'autre que sa partie droite. Les mères tiennent davantage leurs bébés sur le bras gauche que sur le bras droit , gauchères comme droitières, et dans la même veine les amoureux s'embrassent davantage de partie gauche du visage à partie gauche du visage (c'est le cas de 83 % des baisers) . Évidemment ce type de réalité factuelle avait de quoi amuser et les gens qui s'amusent de la Synergologie s'en amusèrent un peu.

Mais depuis que nos observations ont été faites par d'autres équipes, (3) et que les mêmes observations ont été faites dans la célèbre revue Nature, puis dans un certain nombre de revues dites scientifiques elles sont regardées avec davantage de considération. Il semble clair que cela n'a rien à voir avec la latéralité, ce que nous disions il y a prés de dix ans (4)
 
Les plus observateurs d'entre vous pourront décoder les baisers de cinéma. Les acteurs lorsqu'ils commencent à s'embrasser collent leur visage l'un contre l'autre comme Charles et Diana l'ont fait, puis à mesure que le baiser dure, leurs axes de tête prennent la configuration des mouvements de Kate et William et ce, dans une proportion supérieure à 2 sur 3.
Bien évidemment faites attention à observer une scène dans lequel le plan de caméra ne change pas, car les plans de coupe correspondant au mixage de plusieurs scènes pourraient bien modifier cette réalité.
 
Nous avons parié dans le premier et le second de ces trois messages blogue sur l'authenticité du rapport entre Kate et Willliam, leur premier baiser d'époux peut être versé comme pièce supplémentaire à ce dossier…
 
 
(1) Turchet Ph : Les codes inconscients de la séduction , Ed de l'homme, 2004, 180 p.
(2) Turchet Ph : Pourquoi les hommes marchent-ils à la gauche des femmes , Ed de l'homme, 2002, 283 p ; Turchet Ph : Le langage universel du corps, Ed de l'homme, 2010, 380 p.
(3)John van der Kamp, Rouwen Can al-Bruland Kissing right? On the consistency of the head-turning bias in kissing, Latérality, 2010
(4) Barrett, D., Greenwood, J. G., & McCullagh, J. F. (2006). Kissing laterality and handedness. Laterality, 11, 573-579.

Lorsqu’on met dix secondes à se rendre compte qu’on pense !

John-Dylan Haynes du centre de neurosciences de Berlin fit une curieuse expérience (1). Il assit des volontaires devant une table sur laquelle était placés deux boutons, un bouton rouge et un bouton vert. Il demanda aux participants de regarder les deux boutons, de prendre la décision d'appuyer sur un des ces deux boutons et une fois la décision prise, d'appuyer immédiatement. Ces personnes étaient reliées à un IRMf et face à cet IRMf un chercheur assistait à la scène en observant, lui, le cerveau en train de réagir sur un écran d'ordinateur. Ce chercheur observa que le cerveau avait pris sa décision environ 10 secondes avant que les personnes aient le sentiment de le faire spontanément ! Leur cerveau savait donc déjà depuis dix secondes ce qu'elles allaient faire dix secondes plus tard en pensant venir de le décider spontanément … !

D'autres expériences initiées depuis Benjamin Libet en 1983 préparaient déjà JD Haynes à cette observation. Évidemment cette expérience pose des questions relatives au libre arbitre. De quel arbitre disposons-nous si notre cerveau décide à notre insu dix secondes avant nous ?
Vous direz bien évidemment que notre cerveau c'est encore nous ! Mais si vous réfléchissez plus avant, vous vous rendrez compte que c'est un petit peu plus compliqué. Car ce que le cerveau sait, notre corps le montre lui et il le traduit donc parfois près de dix secondes avant que nous en ayons conscience. Celui qui sait décoder les messages du corps dispose lui de ces dix secondes pour vous faire renoncer à faire ce que vous vous apprêtiez à faire… sans que vous en ayez conscience.
Exemple :
Vous accompagnez votre compagne dans un magasin. Elle s'arrête devant un chandail aux couleurs chatoyantes. Ce chandail est trop bigarré pour qu'elle sache immédiatement si elle l'aime. Son corps, lui, montre qu'elle l'aime, parce que son cerveau sait qu'elle l'aime. Elle n'en n'a pas encore conscience.
Vous lui dites alors :
– C'est drôle j'ai vu ce même chandail porté par une personne tellement vulgaire…. Tu le trouves comment toi ?
En fait vous venez d'interférer sur le libre arbitre de votre compagne sans qu'elle en ait eu conscience. Vous transformez son jugement à venir à son insu même. En lui envoyant le message que le chandail est vulgaire, d'une certaine manière vous l'empêchez de le trouver joli. Alors que naturellement elle allait le trouver très à son goût dans quelques secondes…

Il y a des gens qui pensent encore que nous formons nos pensées au moment ou nous les formulons. Ne les réveillez pas trop vite, les gens réveillés trop brutalement sont toujours de mauvaise humeur..

(1)J.-D. Haynes et al., Decoding mental states from brain activity in Humans, in Nature Reviews Neuroscience, vol. 7(7), pp. 523-34, 2006 Compte rendu Cerveau et psycho, n°41 septembre-octobre 2010, pp-70-72.

Ressentir pour comprendre.

 
Le message blogue sur le botox a éveillé de nombreuses réactions d'adhésion ou de scepticisme, et dans tous les cas d'intérêt.
En fait, il semble difficile à imaginer que notre cerveau puisse stimuler des zones corporelles lorsque nous réfléchissons et que le feed back que nous renvoient ces zones corporelles nous permet de ressentir les choses, et donc de les comprendre. Et pourtant…
 
Dans le prolongement du message précédent, une neuropsychologue de l'université de St-Louis, Nicole Speer (1) a fait lire des passages tirés de récits d'aventures à des personnes volontaires et elle s'est aperçue que ces gens faisaient travailler la zone cérébrale en charge de celle du corps, par exemple, se mouvoir le bras si le héros se saisissait d'une arme… L'identification au héros n'était pas que purement intellectuelle , elle était aussi corporelle.
En réalité ce type de recherche aide à admettre que nos réflexions conscientes ne sont jamais purement intellectuelles, elles sont également physiques. Nous devons ressentir ce dont nous parlons pour le comprendre. C'est la raison pour laquelle, par exemple chez les mathématiciens, une zone cérébrale impliquée dans la production des émotions s'active lorsqu'on leur montre des chiffres ! ou que nous avons besoin d'activer les muscles zygomatiques pour comprendre le rire de l'autre…
 
Et la synergologie dans tout ca… car ces découvertes sont faites en apparence assez loin de l'univers de la synergologie. Peut-être pas tant que ça. Dans l'optique d'une vaste constuction d'une science de l'Etre humain, au lieu de montrer l'interaction entre une zone cérébrale et une zone corporelle, il est possible également de retourner le gant pour montrer que la zone corporelle observée est l'interface visible du cerveau !
 
Pour un synergologue une émotion qui ne se voit pas n'existe pas, et si l'émotion se voit, c'est toujours pour parler de la nature de nos pensées !
 
(1) Speer N et al. "Reading stories activates neural representations of visual and motor experiences", in Psychological Science, vol 2, p.989, 2009.

Intelligence, botox et émotions


Bouger les muscles du visage, même subrepticement, lorsque nous réfléchissons permet de mieux comprendre ce à quoi nous pensons !
Sans le savoir, les personnes qui se font injecter du botox permettent aux chercheurs d'établir la réfutabilité de cette théorie, c'est à dire de tester sa véracité en prenant son contrepied.

 

La toxine botulique est produite par une bactérie appelée Clostridium botulinum. Cette bactérie paralyse les muscles du visage dans lesquels elle est injectée. Le muscle devient alors atone et les rides qui pouvaient apparaître disparaissent le temps que dure la paralysie. Des chercheurs de l’Université du Wisconsin (*) ont injecté cette toxine au centre du front, à un groupe de jeunes femmes. Ils leur ont ensuite proposé de lire des textes simples qui suscitaient des émotions négatives, pour lesquelles le muscle corrugateur du front est actionné lorsque la tristesse la peur ou la colère sont ressenties. Ces chercheurs ont noté qu'elles mettaient davantage de temps à comprendre le sens des phrases lues et qu'elles perdaient entre 5 et 10 % du sens du texte.
Nous savons ainsi que si les rides apparaissent c'est parce que nous réfléchissons ! Dans ces moments nous cherchons inconsciemment à ressentir ce que nous évoquons pour le comprendre. En absence de ressenti, ce que nous entendons, lisons, pensons, et que notre cerveau enregistre n'a pas de sens. Nous ne le comprenons pas réellement.

Le corps est donc beaucoup plus impliqué que ce que nous croyions jusque là dans tout effort de réflexion. En synergologie les sceptiques disent parfois en évoquant les microdémangeaisons (traductions de désaccords émotionnels ) : "je me gratte même lorsque je suis tout seul !" Or nous ne sommes jamais tout seuls. Dès que nous réfléchissons, même seuls, nous sommes obligés d'émuler un monde intérieur fait de dialogues imaginaires et notre corps nous aide à ressentir ce que nous pensons pour donner du sens à ces dialogues. Même seuls nous sommes émus et nos traits se déplacent.

Est-il nécessaire d'ajouter que le moment privilégié ou les rides disparaissent est le moment du linceul, le visage totalement détendu par la mort… Un visage où les rides sont visibles et bougent est un visage traversé d'émotions, un visage traversé par la vie…

(*) D. Havas et al., in Psychol. Sc., vol. 21, p. 895, 201

Faire de la politique c’est aussi s’émouvoir !


Une étude récente montre qu'on parvient à deviner l'orientation politique de candidats à des élections dans des proportions avoisinant 6 sur 10 (*), c'est-à-dire supérieures au simple hasard.
Chaque fois que ce type d'observation est présentée, immédiatement chacun se demande : mais comment est-ce possible !?
En fait en y réfléchissant mieux, si tout ca était on ne peut plus logique…!
Cette étude américaine explique que les gens associent aux républicains des qualité de dominance, de maturité alors qu'ils associent aux démocrates des qualités de chaleur et de proximité relationnelle. Or ces qualités humaines reposent sur des émotions elles-mêmes très lisibles sur le visage, et les émotions les plus couramment vécues finissent par marquer le visage. Un visage rituellement fermé, finit par sembler fermé même lorsqu'il est neutre. Un visage souriant semble sourire même lorsque son expression est neutre. Les rides finissent ainsi par prendre la configuration la plus commune du visage. Si maintenant la solidarité est le commun dénominateur des démocrates, la puissance celle qui réunit les républicains. N'est-il pas normal de voir des visages le montrer. Et n'est-ce pas le contraire qui aurait paru plus anormal !

 

 

(*) Rule.N; Ambady N., in PloS, vol 5, p.8735. 2010