Alexithymie et communication non verbale.

Bien que le terme alexithymie, apparu d'abord dans la littérature anglo saxonne en 1973 (1) et soit relativement peu connu dans le grand public, le trouble auquel il correspond est un trouble aisé à identifier parce qu'il touche entre 10 et 15 % de la population : (2) 
La personne alexithymique souffre d'un trouble la conduisant à avoir de la difficulté à comprendre les émotions.
Cette personne ressent bien les sensations corporelles qui sont à l'origine de l'émotion, mais ces sensations corporelles ne prennent pas de coloration émotionnelle :

– " Comment te sens-tu ?
– Je ne sais pas, j'ai une boule dans la gorge…
– C'est agréable, désagréable ?
– Je peux pas dire, c'est une boule dans la gorge…"

C'est comme si les émotions chez les alexithymiques n'accédaient pas à la conscience. (3) Les spécialistes parlent d'ailleurs parfois de cécité émotionnelle.  

Une échelle de mesure de l'alexithymie

Des spécialistes canadiens Taylor, Ryan, et Bagby (4) ont développé une échelle permettant de mesurer l'alexithymie.
Trois facteurs permettraient de l'identifier :

  • La difficulté à faire la distinction entre les sentiments et les sensations corporelles de l'excitation émotionnelle;
  • La difficulté à décrire les sentiments d'autrui;
  • Une pensée opératoire excluant les détails rappelant l'émotion.

Il n'est pas impossible de penser, comme l'ont montré plusieurs recherches, que le déficit de verbalisation du milieu parental, n'aide pas les enfants à identifier et reconnaitre ensuite des émotions, dont on ne leur a pas parlé, et qu'on ne leur a pas appris à reconnaitre. Mais ce mode d'explication ne suffit pas à lui seul à exprimer la réalité de l'alexithymie. Il est également possible que ce soit un mécanisme de défense permettant de se mettre à l'abri de la souffrance. Des mécanismes neurologiques permettraient d'expliquer l'alxithymie sans que l'on sache exactement si ces mécanismes seraient une cause ou une conséquence du parcours émotionnel des alexithymiques
Évidemment les alexityhmiques sont peu empathiques, car ne reconnaissant pas leurs propres émotions, ils éprouveront de la difficulté à attribuer des émotions aux autres. (5)

Nos gestes ne nous trahissent pas

 A l'heure ou le discours ambiant a tendance à dire que nos gestes nous trahissent, nos émotions nous trahissent, et qu'il faudrait se tenir loin de ce qui concerne la meilleure connaissance de tous leurs processus d'observation, il existe une autre école, plus humaniste. Cette école consiste à penser que lorsqu'on à appris à reconnaitre les émotions parce qu'on a appris à les observer sur l'autre, on se rapproche de lui parce qu'on le comprend mieux. On se rapproche également de soi parce qu'on apprend à identifier, à partir de l'autre, des  états que l'on peut développer, reconnaitre, apprivoiser, chez soi. 

Nos émotions ne nous trahissent pas, nos gestes ne nous trahissent pas, donner à lire à l'autre notre bagage corporel, c'est aussi lui proposer des lunettes pour mieux nous comprendre. 
Apprendre à observer c'est apprendre à comprendre,  apprendre à développer des ressources collaboratives, des ressources humaines, sans jeu de mots.

(1) Sifneos,PE (1973). The prevalenceof 'alexithymic' characteristics in psychosomatic patients. Psychotherapy and Psychosomatics,22,255-262
(2) S. Berthoz et al., (2011) Alexithymia from the social neuroscience perspective, in The Handbook of Social Neuroscience, sous la direction de J. Decety et J. Cacioppo, Oxford University Press.
(3) L. Pouga et al., (2010) Individual differences in socio-affective skills influence the neural
bases of fear processing : the case of alexithymia, in Human Brain Mapping, vol. 31(10), pp. 1469- 1481,
(4) Taylor,GJ. Ryan,DP, et Bagby, R.M. (1985) Toward the developmentof a new self-report alexithymia scale. Psychotherapy andPsychosomatics,44,191-199
(5) Cosnier, J. (2006), Psychologie des émotions et des sentiments “ Réed Retz : Paris.

2 réflexions au sujet de « Alexithymie et communication non verbale. »

  1. 13monalisa

    J’ai une question. Mon nouveau supérieur me salue en me faisant une grimace. Il se pointe devant ma porte et là il tire la langue jusqu’au menton pis il s’en va. Il dit que c’est sa façon à lui de saluer. Que dois-je comprendre de ce langage non verbal?

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